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Un secteur en détresse respi­­­­­­­­­­ra­­­­­­­­­­toire

Article paru dans « CORONAVIRUS : SUBIR LE MONDE OU LE RÉINVENTER » (Contrastes, p.3, Mars-Avril 2020)

Faire appel aux dons des citoyens pour payer des respi­­­­­­­­­ra­­­­­­­­­teurs pour les hôpi­­­­­­­­­taux. A Méde­­­­­­­­­cins sans fron­­­­­­­­­tières, à l’ar­­­­­­­­­mée et à la protec­­­­­­­­­tion civile pour instal­­­­­­­­­ler des tentes de fortune sur les parkings d’hô­­­­­­­­­pi­­­­­­­­­taux et soigner les rési­­­­­­­­­dents des maisons de repos. Ces faits sont révé­­­­­­­­­la­­­­­­­­­teurs d’un sous-finan­­­­­­­­­ce­­­­­­­­­ment chro­­­­­­­­­nique dans le secteur des soins de santé. Une fois la crise sani­­­­­­­­­taire passée, il faudra en tirer les leçons, et surtout agir…

Le collec­­­­­­­­­tif Santé en lutte tirait la sonnette d’alarme depuis plusieurs mois. Les Equipes Popu­­­­­­­­­laires s’ap­­­­­­­­­prê­­­­­­­­­taient à lancer une campagne de sensi­­­­­­­­­bi­­­­­­­­­li­­­­­­­­­sa­­­­­­­­­tion pour défendre l’ac­­­­­­­­­cès aux soins de santé via un refi­­­­­­­­­nan­­­­­­­­­ce­­­­­­­­­ment des hôpi­­­­­­­­­taux. Vu le contexte, nous avons décidé de la post­­­­­­­­­po­­­­­­­­­ser pour nous donner le temps de la repo­­­­­­­­­si­­­­­­­­­tion­­­­­­­­­ner, mais le sujet est plus que d’ac­­­­­­­­­tua­­­­­­­­­lité.

Dans l’édi­­­­­­­­­to­­­­­­­­­rial de Contrastes de septembre dernier inti­­­­­­­­­tulé Les hôpi­­­­­­­­­taux sous tension (1), nous écri­­­­­­­­­vions : « La colère gronde depuis plusieurs années dans le secteur des soins de santé (hôpi­­­­­­­­­taux, maisons de repos, soins à domi­­­­­­­­­ci­­­­­­­­­le…). En cause, un défi­­­­­­­­­nan­­­­­­­­­ce­­­­­­­­­ment récur­rent alors que les besoins en matière de santé ne cessent de croître ; une réforme des hôpi­­­­­­­­­taux enta­­­­­­­­­mée par Maggie De Block en 2015 qui fait peser sur le person­­­­­­­­­nel médi­­­­­­­­­cal  la ratio­­­­­­­­­na­­­­­­­­­li­­­­­­­­­sa­­­­­­­­­tion des infra­s­­­­­­­­truc­­­­­­­­­tures et des séjours en hôpi­­­­­­­­­tal ». La crise sani­­­­­­­­­taire qu’on connaît aujourd’­­­­­­­­­hui met égale­­­­­­­­­ment en évidence les  consé­quences sur la qualité des soins ; l’ab­­­­­­­­­sence de masques et de tests de dépis­­­­­­­­­tage est le résul­­­­­­­­­tat d’une réduc­­­­­­­­­tion dras­­­­­­­­­tique des budgets des soins de santé depuis plusieurs années.

Le person­­­­­­­­­nel soignant est encore davan­­­­­­­­­tage mis sous pres­­­­­­­­­sion. Ce sont les véri­­­­­­­­­tables héros de cette crise,  cachés dans l’ombre des experts scien­­­­­­­­­ti­­­­­­­­­fiques qui sont quoti­­­­­­­­­dien­­­­­­­­­ne­­­­­­­­­ment présents dans les médias. Ils sont applau­­­­­­­­­dis chaque soir par la popu­­­­­­­­­la­­­­­­­­­tion qui tient à leur marquer son soutien. Et pour­­­­­­­­­tant, un méde­­­­­­­­­cin urgen­­­­­­­­­tiste s’est exclamé dans les médias : « Je ne supporte pas les gens qui applau­­­­­­­­­dissent les soignants. Les hôpi­­­­­­­­­taux n’ont pas attendu le Covid-19 pour être dans la galère. Que Saint-Pierre doive faire la manche pour avoir des respi­­­­­­­­­ra­­­­­­­­­teurs, c’est une honte totale ! On est où ? Une bonne partie des gens qui applau­­­­­­­­­dissent votent chaque année pour les connards qui dimi­­­­­­­­­nuent les budgets, font des hash­­­­­­­­­tags #keep­­­­­­­­­so­­­­­­­­­phie en oubliant qu’elle a été ministre du Budget d’un gouver­­­­­­­­­ne­­­­­­­­­ment qui a retiré plusieurs milliards d’eu­­­­­­­­­ros dans les soins de santé. Donc merci quand même pour vos applau­­­­­­­­­dis­­­­­­­­­se­­­­­­­­­ments, mais ça fait des années que le person­­­­­­­­­nel hospi­­­­­­­­­ta­­­­­­­­­lier travaille dans des condi­­­­­­­­­tions de merde et se nique la santé en faisant son job du mieux possible. La prochaine fois que vous voyez des mani­­­­­­­­­fes­­­­­­­­­ta­­­­­­­­­tions pour refi­­­­­­­­­nan­­­­­­­­­cer les soins de santé, soute­­­­­­­­­nez-nous. Et quand vous retour­­­­­­­­­ne­­­­­­­­­rez glis­­­­­­­­­ser un bulle­­­­­­­­­tin dans l’urne, réflé­­­­­­­­­chis­­­­­­­­­sez-y à deux fois! »1

Le 7 avril, c’était la Jour­­­­­­­­­née mondiale de la santé. La Plate-forme d’ac­­­­­­­­­tion santé et soli­­­­­­­­­da­­­­­­­­­rité (à laquelle le MOC parti­­­­­­­­­cipe avec d’autres orga­­­­­­­­­ni­­­­­­­­­sa­­­­­­­­­tions dont la MC et la CNE) a orga­­­­­­­­­nisé une action Draps blancs, qu’on a vu fleu­­­­­­­­­rir un peu partout aux fenêtres.  La respon­­­­­­­­­sa­­­­­­­­­bi­­­­­­­­­lité des pays euro­­­­­­­­­péens et de l’Union euro­­­­­­­­­péenne (UE) au travers des poli­­­­­­­­­tiques d’aus­­­­­­­­­té­­­­­­­­­rité s’illustre dans la défaillance actuelle des systèmes de soins et des services publics. Exigeons que les leçons de cette crise soient tirées dès main­­­­­­­­­te­­­­­­­­­nant. La santé n’est pas un coût mais un inves­­­­­­­­­tis­­­­­­­­­se­­­­­­­­­ment, la santé n’est pas une marchan­­­­­­­­­dise mais une exigence légi­­­­­­­­­time et essen­­­­­­­­­tielle dans une société démo­­­­­­­­­cra­­­­­­­­­tique ; celle du respect de la vie et de la dignité humaine. Celles des patients comme celle des travailleurs du secteur.

Monique Van Dieren

  1. Carte blanche parue dans Le Vif du 20/03/20, cosi­­­­­­­­­gnée par Antoine Dumont méde­­­­­­­­­cin assis­­­­­­­­­tant aux urgences à  Liège, cosi­­­­­­­­­gné par Mathilde Dumont infir­­­­­­­­­mière SIAMU aux urgences à Bruxelles

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