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Préju­gés : Mieux vaut en rire ? Pas sûr… ( Contrastes Juin 2015)

Une forte odeur de popu­­­­­­­­­lisme

Préjugés : Mieux vaut en rire ? Pas sûr... (Mai 2015)Dans le langage quoti­­­­­­­­­dien, on a souvent tendance à confondre les notions de stéréo­­­­­­­­­types, préju­­­­­­­­­gés et discri­­­­­­­­­mi­­­­­­­­­na­­­­­­­­­tion. Ginette Herman, profes­­­­­­­­­seure de psycho­­­­­­­­­lo­­­­­­­­­gie sociale et spécia­­­­­­­­­liste de la ques­­­­­­­­­tion, a mis en évidence comment les stéréo­­­­­­­­­types d’abord, les préju­­­­­­­­­gés ensuite, conduisent rapi­­­­­­­­­de­­­­­­­­­ment à des atti­­­­­­­­­tudes discri­­­­­­­­­mi­­­­­­­­­na­­­­­­­­­toires.

L’uti­­­­­­­­­li­­­­­­­­­sa­­­­­­­­­tion correcte de ces mots a son impor­­­­­­­­­tance car seule la discri­­­­­­­­­mi­­­­­­­­­na­­­­­­­­­tion est suscep­­­­­­­­­tible d’être condamné par la Justice.

La légis­­­­­­­­­la­­­­­­­­­tion euro­­­­­­­­­péenne et belge en la matière s’est construite dansles années’90 et 2000. Elle a permis des avan­­­­­­­­­cées signi­­­­­­­­­fi­­­­­­­­­ca­­­­­­­­­tives, mais a aussi montré les limites de l’ac­­­­­­­­­tion répres­­­­­­­­­sive dans un tel domaine. Et elle en a beau­­­­­­­­­coup…

Selon Edouard Delruelle, ancien direc­­­­­­­­­teur du Centre pour l’éga­­­­­­­­­lité des chances et la lutte contre le racisme, « avec les lois anti­­­­­­­­­dis­­­­­­­­­cri­­­­­­­­­mi­­­­­­­­­na­­­­­­­­­toires, on ne s’at­­­­­­­­­taque qu’aux mani­­­­­­­­­fes­­­­­­­­­ta­­­­­­­­­tions exté- rieures et indi­­­­­­­­­vi­­­­­­­­­duelles du racisme.

D’où l’im­­­­­­­­­por­­­­­­­­­tance de déve­­­­­­­­­lop­­­­­­­­­per le volet préven­­­­­­­­­tif et éduca­­­­­­­­­tif et de promou­­­­­­­­­voir la diver­­­­­­­­­sité. » Mais tout cela est-il suffi­­­­­­­­­sant et effi­­­­­­­­­cace ?

Pour lui, malgré l’ex­­­­­­­­­ten­­­­­­­­­sion de la légis­­­­­­­­­la­­­­­­­­­tion et le déve­­­­­­­­­lop­­­­­­­­­pe­­­­­­­­­ment du tissu asso­­­­­­­­­cia­­­­­­­­­tif, force est de consta­­­­­­­­­ter que le racisme et les autres formes de discri­­­­­­­­­mi­­­­­­­­­na­­­­­­­­­tion sont en recru­­­­­­­­­des­­­­­­­­­cence depuis 30 ans, période où le néoli­­­­­­­­­bé­­­­­­­­­ra­­­­­­­­­lisme a commencé son entre­­­­­­­­­prise de démo­­­­­­­­­li­­­­­­­­­tion de l’Etat social.

Hafida Bachir, prési­­­­­­­­­dente de Vie Fémi­­­­­­­­­nine, partage ce constat et met en évidence que la triple domi­­­­­­­­­na­­­­­­­­­tion – patriar­­­­­­­­­cat, capi­­­­­­­­­ta­­­­­­­­­lisme, racisme- se perpé­­­­­­­­­tue et est parti­­­­­­­­­cu­­­­­­­­­liè­­­­­­­­­re­­­­­­­­­ment cumu­­­­­­­­­la­­­­­­­­­tive pour les femmes.

Triple domi­­­­­­­­­na­­­­­­­­­tion dont les effets­­­­­­­­­sont ampli­­­­­­­­­fiés par les poli­­­­­­­­­tiques néoli­­­­­­­­­bé­­­­­­­­­rales(Voir­­­­­­­­­son inter­­­­­­­­­­­­­­­­­view dans ce dossier). Les indus­­­­­­­­­tries cultu­­­­­­­­­relles (médias, ciné­­­­­­­­­ma…) jouent un rôle nocif dans la construc­­­­­­­­­tion et la diffu­­­­­­­­­sion des préju­­­­­­­­­gés.

Comme l’ex­­­­­­­­­plique Lahcen Ait Ahmed dans son article, l’enjeu n’est pas seule­­­­­­­­­ment que les groupes mino­­­­­­­­­ri­­­­­­­­­taires soient davan­­­­­­­­­tage présents et « expo­­­­­­­­­sés » dans les médias, mais de « créer des modes alter­­­­­­­­­na­­­­­­­­­tifs de narra­­­­­­­­­tion par et pour les mino­­­­­­­­­ri­­­­­­­­­tés ».

Le person­­­­­­­­­nel poli­­­­­­­­­tique n’est pas en reste non plus, et nombreux sont celles et ceux qui se servent des pré- jugés ou surfent sur la vague de la peur pour faire passer – en douce ou en force – des mesures discri­­­­­­­­­mi­­­­­­­­­na­­­­­­­­­toires et de plus en plus répres­­­­­­­­­sives.

Avec la propa­­­­­­­­­ga­­­­­­­­­tion de discours et d’actes stig­­­­­­­­­ma­­­­­­­­­ti­­­­­­­­­sants, dont les cibles sont les maillons faibles de la broyeuse écono­­­­­­­­­mico-finan­­­­­­­­­cière, la pers­­­­­­­­­pec­­­­­­­­­tive d’une société ouverte, tolé­­­­­­­­­rante et soli­­­­­­­­­daire nous file de plus en plus entre les doigts.

Toutes les formes de lutte contre les préju­­­­­­­­­gés sont indis­­­­­­­­­pen­­­­­­­­­sables, non seule­­­­­­­­­ment pour proté­­­­­­­­­ger ceux qui en sont victimes, mais aussi pour ne pas lais­­­­­­­­­ser entraî­­­­­­­­­ner l’en­­­­­­­­­semble des citoyens dans la vague popu­­­­­­­­­liste. Car de bour­­­­­­­­­reaux invo­­­­­­­­­lon­­­­­­­­­taires, ces derniers fini­­­­­­­­­ront peut-être bien par en deve­­­­­­­­­nir eux aussi victi­­­­­­­­­mes…

Sommaire

p3 – Stéréo­­­­­­­­­types, préju­­­­­­­­­gés et discri­­­­­­­­­mi­­­­­­­­­na­­­­­­­­­tions
(Par Clau­­­­­­­­­dia Bene­­­­­­­­­detto)
Les personnes du sud aiment faire la fête, les chômeurs sont des profi­­­­­­­­­teurs, les femmes sont fragiles, les étran­­­­­­­­­gers nous enva­­­­­­­­­his­­­­­­­­­sent… Stéréo­­­­­­­­­types, préju­­­­­­­­­gés et discri­­­­­­­­­mi­­­­­­­­­na­­­­­­­­­tions, ces mots abstraits recouvrent des croyances et des atti­­­­­­­­­tudes on ne peut plus concrètes. Ils sont au cœur des rela­­­­­­­­­tions sociales et touchent tout le monde.

p6 – Les lois, néces­­­­­­­­­saires mais pas suffi­­­­­­­­­santes
(Par Monique Van Dieren)
La légis­­­­­­­­­la­­­­­­­­­tion belge en matière de lutte contre la discri­­­­­­­­­mi­­­­­­­­­na­­­­­­­­­tion a une longueur d’avance sur de nombreux pays euro­­­­­­­­­péens. Mais la voie juri­­­­­­­­­dique loin d’être suffi­­­­­­­­­sante dans un contexte de regain de tensions sociales et ethniques. Les pistes d’ac­­­­­­­­­tion sont multi­­­­­­­­­di­­­­­­­­­men­­­­­­­­­sion­­­­­­­­­nelles, même s’il faut être conscient que rien n’est plus diffi­­­­­­­­­cile que de lutter contre les préju­­­­­­­­­gés qui sont à la source de la plupart des discours ou actes discri­­­­­­­­­mi­­­­­­­­­na­­­­­­­­­toires.

p9 – Inter­­­­­­­­­view : Hafida Bachir : “Les sché­­­­­­­­­mas de pensée impactent les poli­­­­­­­­­tiques publiques !”
(Par Jean-Michel Char­­­­­­­­­lier)
Les préju­­­­­­­­­gés font partie du discours qui accom­­­­­­­­­pagne les systèmes de domi­­­­­­­­­na­­­­­­­­­tion à l’œuvre dans nos socié­­­­­­­­­tés. C’est clai­­­­­­­­­re­­­­­­­­­ment l’avis d’Ha­­­­­­­­­fida Bachir, Prési­­­­­­­­­dente de Vie Fémi­­­­­­­­­nine. Le mouve­­­­­­­­­ment fémi­­­­­­­­­niste a analysé et conteste les méca­­­­­­­­­nismes en action. Patriar­­­­­­­­­cat, capi­­­­­­­­­ta­­­­­­­­­lisme, racisme : autant de domi­­­­­­­­­na­­­­­­­­­tions, qui diffusent et s’ali­­­­­­­­­mentent de préju­­­­­­­­­gés et stéréo­­­­­­­­­types et in fine orga­­­­­­­­­nisent la discri­­­­­­­­­mi­­­­­­­­­na­­­­­­­­­tion.

p13 – L’ère de la “stig­­­­­­­­­mé­­­­­­­­­dia­­­­­­­­­ti­­­­­­­­­sa­­­­­­­­­tion”
(Par Lahcen Ait Ahmed)
Quel rôle jouent les indus­­­­­­­­­tries cultu­­­­­­­­­relles (médias, ciné­­­­­­­­­ma…) dans la construc­­­­­­­­­tion et la diffu­­­­­­­­­sion des stéréo­­­­­­­­­types et préju­­­­­­­­­gés concer­­­­­­­­­nant les mino­­­­­­­­­ri­­­­­­­­­tés poli­­­­­­­­­tiques et en parti­­­­­­­­­cu­­­­­­­­­lier les classes popu­­­­­­­­­laires, les femmes et les groupes ethniques ?

p16 – Adieu le poli­­­­­­­­­tique­­­­­­­­­ment correct
(Par Muriel Vander­­­­­­­­­borght)
Jusqu’il y a peu, on pensait que les discours stig­­­­­­­­­ma­­­­­­­­­ti­­­­­­­­­sants étaient l’apa­­­­­­­­­nage des partis d’ex­­­­­­­­­trême-droite. Depuis quelques années pour­­­­­­­­­tant, nombreux sont les hommes et femmes poli­­­­­­­­­tiques qui surfent sur les peurs des citoyens pour engran­­­­­­­­­ger des voix… et parfois pour faire passer des mesures peu respec­­­­­­­­­tueuses des prin­­­­­­­­­cipes de non-discri­­­­­­­­­mi­­­­­­­­­na­­­­­­­­­tion.

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