Traité transatlantique : Un pacte dévastateur ( Contrastes Août 2014)
Le TTIP, un Traité ? Non : un marché !
Ah les jolis mots qui fleurissent, en français, en anglais ; en entier ou en sigles ! Les sigles, c’est plus obscur évidemment, mais ça titille l’imagination. Non ?
TTIP, TPCI, TAFTA, GMT AMT… cela ne vous fait pas rêver ? Bon, d’accord. Mais « Traité »… ça c’est un joli mot, tout de même ! Cela fait penser à « Traité de paix », colombe blanche… On s’imagine des représentants du peuple animés des meilleures intentions concluant un accord politique fondé sur des institutions qui aideront à préserver la paix et assurer la prospérité des citoyens.
On pressent la foule silencieuse, attendant avec un frémissement que les portes d’un parlement s’ouvrent et qu’un porte-parole vienne au balcon proclamer que « ça y est, le Traité est signé »…
Un Traité transatlantique, qui plus est ! La paix mondiale, quoi ! Non ? Vous ne croyez pas à cette image d’Epinal ? Eh bien, vous avez mille fois raison. De nos jours, il faut se méfier des mots.
Le Traité dont il est question dans ce numéro de Contrastes n’a pas beaucoup de points communs avec un Traité de paix. Il a par contre beaucoup à voir avec la guerre commerciale que livrent depuis des décennies les multinationales pour venir à bout des règlementations qui gênent leur compétitivité et pour s’emparer des services publics, la mine d’or qu’elles rêvent de s’approprier.
Le TTIP ne ressemble pas beaucoup à la blanche colombe qui symbolise la paix. Il a plutôt les contours d’une arme de destruction massive, y compris pour les institutions démocratiques qui, toutes fragiles et perfectibles qu’elles soient, assurent des modalités de participation citoyenne à la prise de décision.
Le TTIP n’est pas tant un projet de traité qu’un accord de marché qui se négocie entre l’Europe et les Etats-Unis. Un grand marché transatlantique dont les conditions d’avènement menacent de multiples domaines de la vie quotidienne. C’est pourquoi ses promoteurs ont voulu ces négociations aussi secrètes que possible.
Heureusement, la vigilance de la société civile n’est pas qu’un vain mot. Aujourd’hui, ce projet d’accord fait l’objet de toutes les attentions et mobilise une partie de plus en plus grande de la population.
Sur quoi porte cet accord ? Quels sont les risques et dans quels domaines ? Quels sont les dispositifs en négociation qui font de ce projet une réelle menace pour l’emploi, pour la santé publique, pour la qualité de la vie et de l’environnement, et même pour la démocratie ? Et comment la résistance s’organise-t-elle chez nous et ailleurs pour empêcher la réalisation de ces menaces ?
C’est à ces questions que les articles qui suivent veulent répondre. Car il est important de comprendre pour se situer et pour agir. Parfois, nos élus devraient se remémorer cette maxime un peu pontifiante et pourtant si vraie, avant de pousser sur le bouton vert.
Et d’ores et déjà, retenez cette date : le 12 octobre 2014. L’Alliance D19–20 vous y fixe rendez-vous. Jamais entendu ce nom ? Vous la découvrirez en lisant l’interview de notre invité : Felipe Van Keirsbilk.
Au moins, son nom à elle dit bien ce que c’est : faire alliance avec tous les travailleurs concernés dans tous les secteurs. C’est ce qui compte maintenant !
Sommaire
p 3 LE NOUVEL AVATAR DE L’EXPANSION CAPITALISTE
Par Myriam Djegham
Depuis juin 2013, la Commission européenne négocie avec les représentants américains les conditions d’un accord de libre-échange. Ils espèrent aller vite et conclure en 2015, avant l’élection du prochain président des Etats-Unis. Si cet accord aboutit, il constituera la plus grande zone de libre-échange commercial à ce jour, soit 45,5 % du PIB mondial.
p 5 UN MOT D’ORDRE : L’OPACITE
Par Nicolas Vandenhemel
« Pour vivre heureux, vivons cachés », dit le dicton. et, selon toute vraisemblance, celles et ceux qui négocient pour l’union européenne et les états-unis pour aboutir à un grand marché transatlantique l’ont bien compris. mais en réalité, la pratique n’a rien de neuf.
p 8 QUAND LE DROIT DU TRAVAIL DEVIENT UN “OBSTACLE INUTILE AU COMMERCE”
Par Nicolas Vandenhemel
La chanson libérale nous vante depuis longtemps la dynamique vertueuse du libre-échange. Son refrain : plus on exporte, plus on s’enrichit, plus on crée de l’emploi. Le grand marché transatlantique serait donc une voie de progrès social ? Posons la question autrement : où voit-on que la concurrence effrénée entre pays crée plus d’emplois qu’elle n’en détruit ?
p 11 LE BRAS ARMÉ DES MULTINATIONALES
Par Myriam Djegham
Agroalimentaire, énergie, mutuelles, enseignement, vie privée, culture… il serait plus facile de nommer ce à quoi le projet de grand marché transatlantique ne s’attaquera pas. L’enjeu est bien de faire adopter une arme de destruction massive des réglementations qui empêchent les entreprises de conquérir de nouveaux marchés et de s’y assurer de juteux profits. Focus sur l’agroalimentaire, l’environnement et les services publics.
p 14 INTERVIEW| FELIPE VAN KEIRSBILCK : LE POT DE TERRE PEUT VAINCRE LE POT DE FER
Par Paul Blanjean et Monique Van Dieren
Aux barricades avec l’Alliance D19–20 pour empêcher la signature du Traité Transatlantique, Felipe Van Keirsbilck, secrétaire général de la CNE, en est persuadé : la mobilisation actuelle peut faire capoter ce désastre pour l’emploi, la protection sociale, l’environnement, la démocratie. Regard lucide et sans concession sur ce qui se trame en coulisses. Et tour d’horizon de la résistance qui s’organise.
p 19 LE TTIP NE DOIT PAS PASSER !
Par Christine Steinbach
Le grand marché transatlantique n’est rien d’autre qu’un moyen pour consacrer le libre échange et détricoter une longue liste de réglementations mises en place pour faire reculer la loi de la jungle. Sur le plan démocratique, il tend à consacrer la toute-puissance des dirigeants économiques au détriment des représentants du peuple.
Prix au n°
Prix au n° : 2 €
Pour s’abonner (Contrastes + La Fourmilière)