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J’peux pas, j’ai arpen­tage !

Article paru dans La Four­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­mi­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­lière, Bulle­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­tin de liai­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­son des Equipes Popu­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­laires, Janvier-Février 2021, p.8

La situa­­­­­­­­­­­­­tion sani­­­­­­­­­­­­­taire nous oblige à faire preuve de créa­­­­­­­­­­­­­ti­­­­­­­­­­­­­vité pour main­­­­­­­­­­­­­te­­­­­­­­­­­­­nir le contact au sein de nos groupes, conti­­­­­­­­­­­­­nuer à susci­­­­­­­­­­­­­ter la réflexion, construire un savoir commun. Et c’est plus que jamais néces­­­­­­­­­­­­­sai­­­­­­­­­­­­­re… Voici une tech­­­­­­­­­­­­­nique de lecture collec­­­­­­­­­­­­­tive connue de longue date mais qui (re)fait surface dans plusieurs groupes EP, notam­­­­­­­­­­­­­ment à Liège, au Brabant wallon et à Namur : l’ar­­­­­­­­­­­­­pen­­­­­­­­­­­­­tage.

L’ar­­­­­­­­­­­­­pen­­­­­­­­­­­­­tage est plutôt connu pour être la tech­­­­­­­­­­­­­nique de la mesure de la super­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­fi­­­­­­­­­­­­­cie des terres, en parti­­­­­­­­­­­­­cu­­­­­­­­­­­­­lier des terrains agri­­­­­­­­­­­­­coles. Mais ce n’est pas que ça ! Non, l’ar­­­­­­­­­­­­­pen­­­­­­­­­­­­­tage dénomme aussi une tech­­­­­­­­­­­­­nique de lecture collec­­­­­­­­­­­­­tive issue de la culture ouvrière de la fin du 19e siècle et reprise depuis par l’édu­­­­­­­­­­­­­ca­­­­­­­­­­­­­tion popu­­­­­­­­­­­­­laire.

L’ar­­­­­­­­­­­­­pen­­­­­­­­­­­­­tage vise à se parta­­­­­­­­­­­­­ger la lecture d’une œuvre afin de se forger une culture commune. Il s’agit de déchi­­­­­­­­­­­­­rer un livre en plusieurs parties corres­­­­­­­­­­­­­pon­­­­­­­­­­­­­dant au nombre de lecteurs. L’ar­­­­­­­­­­­­­pen­­­­­­­­­­­­­tage permet avant tout de rappro­­­­­­­­­­­­­cher chacun de la lecture. En désa­­­­­­­­­­­­­cra­­­­­­­­­­­­­li­­­­­­­­­­­­­sant le livre, en le déchi­­­­­­­­­­­­­rant, en se parta­­­­­­­­­­­­­geant sa lecture, on se rend compte qu’on est tous capables de s’ap­­­­­­­­­­­­­pro­­­­­­­­­­­­­prier le contenu d’un livre et surtout de le confron­­­­­­­­­­­­­ter avec nos vies, nos ques­­­­­­­­­­­­­tions, nos obser­­­­­­­­­­­­­va­­­­­­­­­­­­­tions.

L’ar­­­­­­­­­­­­­pen­­­­­­­­­­­­­tage va du coup permettre de s’at­­­­­­­­­­­­­taquer à des ouvrages consé­quents que nous n’au­­­­­­­­­­­­­rions pas eu le courage de décou­­­­­­­­­­­­­vrir seuls, des ouvrages socio­­­­­­­­­­­­­lo­­­­­­­­­­­­­giques qui inter­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­rogent le sens de notre société. Cela va permettre la co-construc­­­­­­­­­­­­­tion d’un savoir. L’idée n’est pas de faire un résumé complet du livre mais d’en déga­­­­­­­­­­­­­ger les idées-forces et les ques­­­­­­­­­­­­­tions que cela suscite en nous et de les confron­­­­­­­­­­­­­ter à notre savoir et à notre expé­­­­­­­­­­­­­rience.

Idéa­­­­­­­­­­­­­le­­­­­­­­­­­­­ment, l’ar­­­­­­­­­­­­­pen­­­­­­­­­­­­­tage se pratique en présence de chacun des parti­­­­­­­­­­­­­ci­­­­­­­­­­­­­pants dans un local assez grand qui permet à chacun de s’iso­­­­­­­­­­­­­ler quelque peu le temps de la lecture. Des
grandes feuilles sont mises à dispo­­­­­­­­­­­­­si­­­­­­­­­­­­­tion pour y noter ce que l’on veut resti­­­­­­­­­­­­­tuer aux autres membres du groupe. Le timing sera adapté en fonc­­­­­­­­­­­­­tion du type d’ou­­­­­­­­­­­­­vrage et du nombre de parti­­­­­­­­­­­­­ci­­­­­­­­­­­­­pants. Plusieurs séances seront peut-être néces­­­­­­­­­­­­­saires.

EN MODE COVID

Situa­­­­­­­­­­­­­tion sani­­­­­­­­­­­­­taire oblige, ces derniers mois, nous avons dû nous adap­­­­­­­­­­­­­ter et avons testé l’ar­­­­­­­­­­­­­pen­­­­­­­­­­­­­tage en ligne. C’est certai­­­­­­­­­­­­­ne­­­­­­­­­­­­­ment moins drôle mais cela nous a permis cepen­­­­­­­­­­­­­dant de décou­­­­­­­­­­­­­vrir l’ou­­­­­­­­­­­­­vrage « La société du sans-contact, selfie d’un monde en chute » de François Saltiel. Le livre a été fourni à chacun, on s’est laissé quelques jours pour permettre à chacun de lire sa partie. Ensuite pendant une mati­­­­­­­­­­­­­née, on s’est partagé nos décou­­­­­­­­­­­­­vertes. Nous devons main­­­­­­­­­­­­­te­­­­­­­­­­­­­nant déter­­­­­­­­­­­­­mi­­­­­­­­­­­­­ner la suite à donner à cette lecture.
Chaque lecture est une porte d’en­­­­­­­­­­­­­trée sur une série de sujets que l’on peut déci­­­­­­­­­­­­­der d’ex­­­­­­­­­­­­­plo­­­­­­­­­­­­­rer plus en avant ou pas. Ça peut être égale­­­­­­­­­­­­­ment le point de départ d’une prise de
conscience, d’une action, d’une mobi­­­­­­­­­­­­­li­­­­­­­­­­­­­sa­­­­­­­­­­­­­tion.

L’ar­­­­­­­­­­­­­pen­­­­­­­­­­­­­tage se prête très certai­­­­­­­­­­­­­ne­­­­­­­­­­­­­ment moins à la lecture de romans mais quoique… J’ai décou­­­­­­­­­­­­­vert que des profes­­­­­­­­­­­­­seurs de français l’uti­­­­­­­­­­­­­li­­­­­­­­­­­­­saient parfois pour faire décou­­­­­­­­­­­­­vrir
un roman, une pièce de théâtre en une heure de cours à leurs élèves. L’ani­­­­­­­­­­­­­ma­­­­­­­­­­­­­tion et les ques­­­­­­­­­­­­­tions auxquelles chaque élève doit répondre à l’is­­­­­­­­­­­­­sue de la lecture de sa partie sont
bien sûr adap­­­­­­­­­­­­­tées.

Cela permet, en un temps restreint, de propo­­­­­­­­­­­­­ser la lecture inté­­­­­­­­­­­­­grale d’une œuvre. Se parta­­­­­­­­­­­­­ger la lecture permet de ne pas bloquer certains élèves réti­­­­­­­­­­­­­cents à la lecture d’un ouvrage complet et va par contre susci­­­­­­­­­­­­­ter chez certains l’en­­­­­­­­­­­­­vie de décou­­­­­­­­­­­­­vrir ensuite l’en­­­­­­­­­­­­­tiè­­­­­­­­­­­­­reté du livre.

La tech­­­­­­­­­­­­­nique semble donc adap­­­­­­­­­­­­­table dans diffé­­­­­­­­­­­­­rents contextes pour aider à lire collec­­­­­­­­­­­­­ti­­­­­­­­­­­­­ve­­­­­­­­­­­­­ment des œuvres diffi­­­­­­­­­­­­­ciles à lire seul, longues ou complexes.

Et si déchi­­­­­­­­­­­­­rer les livres permet­­­­­­­­­­­­­tait de retrou­­­­­­­­­­­­­ver du sens, de recréer du lien entre nous et de construire un savoir commun ? On en a sans aucun doute pas mal besoin… Alors à
quand un petit arpen­­­­­­­­­­­­­tage au salon ?

Françoise Caudron

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